Flashback culturel : ce que nous retenons de 2021

C’est déjà la troisième année que nous nous livrons au plaisir de relever parmi nos découvertes culturelles de l’année, celles qui nous ont le plus marquées et dont le souvenir nous accompagnera encore un moment. 

Les juristes parmi nous ferons remarquer qu’un évènement répété trois fois devient une coutume, ce dont nous nous réjouissons : l’aventure ZAO fait son chemin, et nous profitons de cette fin d’année pour remercier nos lectrices et lecteurs, assidus ou de passage, tout en se souhaitant à tous, de beaux projets pour 2022.

2021 a peut-être parfois balbutié mais n’a pas déçu. Enrichie de découvertes, de voyages, d’expériences et de sensations fortes, l’équipe ZAO revient sur ses coups de cœur culturels de l’année.

ARIANE DIB

Paris redécouvert :  la réouverture du musée Carnavalet

Ayant grandi à Paris, j’ai redécouvert avec joie le musée dédié à la ville lumière et son histoire, à l’occasion de sa réouverture en mai dernier, après quatre ans de travaux. En effet, a été déployée une restauration des deux  hôtels particuliers du Marais accueillant le plus ancien musée de la municipalité – ouvert en 1880  -, ainsi qu’une transformation du musée. 

Le parcours chronologique, quoique très dynamique, permet de comprendre l’évolution de la capitale de préhistoire à nos jours au travers d’artefacts, d’œuvres d’art ou de period rooms. La visite est ponctuée de nouveaux dispositifs de médiation, notamment numériques, particulièrement réussis qui approfondissent de manière didactique le contenu scientifique dense. 

On se balade entre la salle des enseignes et la reconstitution de la bijouterie Fouquet, décorée par l’immense Alfons Mucha, en profitant d’une muséographie complète mais qui évite l’écueil du trop plein ou de l’étouffant. À parcourir sans modération.

Informations pratiques : Musée Carnavalet, 23 rue de Sévigné, 75003 Paris.

Monstre sacré ou monstre tout court ? : “Picasso, séparer l’homme de l’artiste”

Depuis quelues temps déjà je me suis passionnée pour les podcast, et notamment pour Vénus s’épilait-elle la chatte, dans lequel Julie Beauzac travaille à déconstruire l’histoire de l’art occidentale à l’appui des théories feministes, post-coloniales, queer, antiracistes, … Le titre de l’émission fait référence sans détour à la tradition centenaire de représenter les femmes nues sous le prétexte du mythe, une excuse renforcée par l’apparence imberbe – et donc divine. Si beaucoup d’épisodes m’ont intéressée, l’un d’entre eux m’a particulièrement marqué – et je ne suis pas la seule puisqu’il a remporté trois prix lors du Paris Podcast Festival. Il s’agit de “Picasso, séparer l’homme de l’artiste”, au cours duquel Julie Beauzac et Sophie Chauveau, autrice de  Picasso : Le regard du Minotaure, s’intéressent à la figure de l’artiste le plus connu et le plus vendu au monde, mais peut-être l’un des plus problématiques dans son rapports aux autres. 

Ce podcast permet de faire face à notre malheureuse manie de placer sur un piédestal “l’Artiste, génie créateur tout puissant”. Cette tradition nous empêche d’expliquer les biais sexiste, raciste ou homophobe d’un artiste voire d’une œuvre, ce qui constitue une manière pertinente d’étudier ces productions mais aussi de comprendre pourquoi elles sont célébrées malgré tout. Il ne s’agit en effet pas de nier l’importance de Picasso pour l’art moderne, mais de prendre du recul sur un récit parfois hagiographique, pour étudier le processus de création dans toute sa complexité et réfléchir à comment faire face à nos propres démons culturels. 

La violence, présente sous bien des formes dans le cas présent, est abordée sans faux semblants, même après plusieurs avertissements et autres trigger warnings bien nécessaires. Je suis moi-même restée sans voix pendant un long moment après l’écoute, abasourdie par la dureté d’un sujet que je pensais connaître en tant qu’historienne de l’art. 

Cette émission est pour moi à la fois une pépite de démocratisation des savoirs en histoire de l’art et en sciences humaines tout en conservant la nuance et la complexité des sujets, n’en déplaise à ceux qui crieraient à la “cancel culture”. 

Réparer les pots cassés : Les Flammes

Aux côtés de la non moins réussie exposition dédiée à Josef et Anni Albers, le Musée d’Art Moderne de Paris offre un véritable bijou muséal : Les Flammes. L’Âge de la céramique. Cette exposition consacrée à la céramique sous toutes ses formes et ses époques est à la fois didactique et vivante. Par une sélection de 350 œuvres d’art et d’objets divers, de Vénus préhistorique à la célèbre Dinner Party de Judy Chicago, en passant tant par de la porcelaine XVIIIe siècle que par des prothèses dentaires.

Sa structure volontairement simple valorise la clarté des explications tant historiques de l’art que sociologiques relatives aux techniques, usages et messages. Le regard porté sur la céramique est pertinent, profond tout en étant accessible et mettant en valeur des œuvres réellement internationales (et non purement occidentales), d’artistes de tout genre, et d’horizons différents. 

La scénographie, très moderne, est ponctuée d’un mobilier muséal (socles, bancs, …) lui-même magnifique, réalisé par Cros/Patras, en collaboration avec Natsuko Uchino. Elle sort le discours du white cube traditionnel et fait vivre ces espaces rénovés du musée. Par ailleurs, un programme de collecte placé au sein de l’exposition, présente des céramiques déposées par les visiteurs, et fait écho aux pratiques scientifiques des musées d’art et traditions populaires dans leur approche sociologique et anthropologique des productions matérielles. 

Le muséologue autant que le néophyte pourront ainsi s’enflammer pour cette exposition – sans mauvais jeu de mots – jusqu’au 6 février prochain. 

Informations pratiques : Les Flammes. L’Âge de la céramique, du 15 octobre 2021 – 6 février 2022, Musée d’art Moderne de la ville de Paris

CONSTANT DAURÉ

La BO de l’année : Vivo 

Andrea Laszlo De Simone signe la BO de cette année, du moins, de mon année. Le chanteur italien a sorti le single Vivo au mois de janvier, dont les paroles pourraient résumer parfaitement le mélange de désarroi, de questionnements mais avant tout d’espérance et d’hédonisme avec lequel nous avons abordé 2021.

Si je vous parlais de Sébastien Tellier l’année dernière, c’est par hasard mais grâce à lui que j’ai découvert Andrea Laszlo De Simone, que l’on m’a présenté comme le Tellier italien. Je me suis alors empressé de l’écouter, et si les univers musicaux semblent distincts, la passion, le génie et le romantisme de ces deux artistes les unissent en effet.

« Rare », « intime », « précieux » ou « cosmique » définissent l’artiste italien, dont la musique oscille de l’expérimentation à la variété italienne aux allures vintage. Ses mélodies procurent une soudaine envie d’apprendre l’italien ou de s’aventurer pour le pratiquer. : il faut pour cela écouter « Immensità », magnum opus -pour le moment- du musicien, dont les 4 titres nous bouleversent, comme la vue des étoiles, qui est la pochette de l’E.P., ou de l’horizon sur l’océan, un jour d’hiver. 

Les plus chanceux l’auront vu ce mois-ci en concert à Rennes, son premier en France, exceptionnel puisque le chanteur souhaiterait davantage se consacrer au studio et à sa vie de famille plutôt qu’à la scène. Pour se consoler en attendant de nouvelles dates, nous avons la captation depuis la Triennale de Milano de Vivo justement, dont on ne se lassera pas en 2022.

Martin Margiela se dévoile à Lafayette Anticipations

2021 restera l’année du retour de Martin Margiela, ou plutôt de sa révélation.  

Les expositions dédiées à Margiela ont été nombreuses. On se souvient notamment de la rétrospective du Palais Galliera en 2018, sous la propre direction artistique du créateur. Mais cette exposition à Lafayette Anticipations est exceptionnelle : c’est en tant qu’artiste que Martin Margiela se présente. Et cela, pour la première fois.

Martin Margiela est en effet connu pour ses créations de mode : il a fondé sa propre maison éponyme en 1988 par laquelle il a révolutionné le milieu de la mode pendant 20 ans. Il a également côtoyé les grandes maisons de Luxe, en dirigeant les collections de prêt-à-porter Femme de la Maison Hermès de 1997 à 2003.

Par cette exposition, Martin Margiela semble dévoiler son vrai visage, ou plutôt, comme le relève Lafayette Anticipation « Martin Margiela, légendaire créateur de mode, a toujours été un artiste ». L’excitation était grande pour chaque admirateur du créateur : quelle forme prendra son travail artistique ?

A l’instar du créateur, l’exposition est surprenante, mystérieuse, accomplie et esthétique. Martin Margiela twiste l’espace d’exposition de Lafayette Anticipations à l’aide de stores californiens, très années 70, rappelant une certaine esthétique de la modernité et de bureaux aujourd’hui défraîchis. Il crée grâce à cela un parcours d’exposition labyrinthique, où des surprises attendent le spectateur tout au long de la visite.

Cette exposition est passionnante puisqu’on peut déceler dans ces œuvres l’essence même de ce qui habite Martin Margiela : des thèmes, idées, obsessions ou modus opérandi qui prenaient forme par des collections se retrouvent dans l’espace d’exposition, après être passés par les mains de l’artiste.

Je pense ici au thème du corps, récurrent, de son image, de la manière dont il est transformé, modifié. En témoignent l’affiche de l’exposition, où Margiela choisit un déodorant, ses statues d’ongles rouges ou ses memento mori de cheveux blancs. Nous pouvons relever également le collectif, puisque le créateur a toujours fait un pas en arrière pour laisser place à son équipe. Pendant l’exposition, un ensemble de médiateurs mettait en mouvement les œuvres de l’artiste par des gestes répétitifs : cacher/ dévoiler ses sculptures à l’aide d’un tissu blanc, déplacer/ afficher ses collages sur des couvertures de magazines, éteindre/ allumer un spot d’exposition illuminant un pastel à l’huile sur velours.

La mode de Margiela a toujours été qualifiée de conceptuelle. Tout au long de l’exposition, des cartels sont disposés, mais sans œuvre présentée à leurs côtés, seulement une trace au mur, comme une ombre, un fantôme de création. Chacun est libre, à partir de l’explication, d’imaginer ce que serait cette œuvre. Rappelant à juste titre que l’art est avant tout une cosa mentale, Margiela semble tout de même faire un pied-de-nez, puisque l’exposition se termine sur de grands éclats rires, remettant ces œuvres en perspective. Margiela aurait-il été trop pris au sérieux?  Sans doute une énième démonstration que l’humour belge n’a pas de limite. 

Informations pratiques : Lafayettes Anticipations, du 20 octobre 2021 au 2 janvier 2022

© Pierre Antoine

MATHILDE PRÉVOTAT

Prendre de la hauteur avec Le Sommet des dieux 

Ce film d’animation franco-luxembourgeois tiré d’un manga de Jirô Taniguchi est un concentré de grâce. 

Un homme enquête sur l’un des plus grands mystères de l’histoire de l’alpinisme : Mallory, alpiniste britannique ayant tenté de gravir l’Everest en 1824 est-il parvenu à atteindre son sommet ? La clef du mystère pourrait bien se trouver dans l’appareil photo qu’avait emporté Mallory lors de sa conquête de l’Everest et qui n’a jamais été retrouvé. 

Un photographe japonais croit le reconnaître entre les mains d’Habu Jôji, un alpiniste que l’on croyait lui aussi disparu depuis quelques années. S’ouvre alors une enquête palpitante, ponctuée de flashback sur la vie d’Habu et sur sa soif de conquête des sommets enneigés. 

Outre l’intrigue qui tient en haleine du début jusqu’à la fin, les dessins et la bande originale signée Amine Bouhafa sont absolument superbes. Un magnifique film sur le dépassement de soi qui permet de répondre à la question suivante : pourquoi risquer sa vie pour gravir l’Everest ? 

Baselitz à Pompidou 

« C’est particulier … » la phrase de la rétrospective Baselitz !  Entendue plusieurs fois dans la bouche de deux dames âgées visant l’exposition. Pas étonnant, lorsqu’on sait que les premières expositions de l’artiste allemand ont fait scandale dans son pays natal…Et en effet, les toiles exposées peuvent interroger voire choquer le spectateur. De grand format, elles sont parfois sanguinolentes, souvent violentes.

Avec cette rétrospective, le Centre Pompidou présente 60 années de création de l’un des artistes contemporains les plus cotés sur le marché. Un parcours chronologique nous permet d’explorer les différents cycles du célèbre artiste allemand et met en lumière ses inspirations. De l’art brut en passant par le maniérisme, Baselitz puise dans ses influences et déforme les corps, les renverse avec une palette chromatique évoquant l’expressionnisme.

L’exposition le dévoile, Baselitz est hanté par les souvenirs de la guerre. L’artiste ne cesse de l’évoquer tout au long de son œuvre : blessés, morceaux de corps mutilés, gestes évoquant le salut nazi, corps éclaboussés de sang. Les œuvres de Baselitz secouent le spectateur et ne peuvent le laisser indifférent. 

À côté des peintures, des gravures et des sculptures de l’artiste jonchent l’exposition qui se termine en beauté avec l’une des sculptures en bronze massif réalisées à partir de structures de bois tronçonnées. Sa jumelle vous attend devant les Beaux Arts de Paris. Elle y est exposée pour toute la durée de l’exposition. 

Informations pratiques : Centre George Pompidou, du 20 octobre 2021 au 7 mars 2022

JOSÉPHINE DE GOUVILLE

Nona et ses Filles : Valérie Donzelli signe sa première série

« Je m’appelle Elisabeth Perrier, mais tout le monde dit Nona. Je suis féministe […] Aujourd’hui j’ai 70 ans, je suis de nouveau enceinte, et c’est vraiment une catastrophe ! »

Avec Nona et ses Filles, Valérie Donzelli signe sa première série. A travers neuf épisodes d’une trentaine de minutes, on plonge dans une fiction délicieuse, qui passe son temps à jouer avec les limites du réel. Une femme de 70 ans qui s’apprête à donner la vie ? On y croit, et ce dès le premier épisode !

Le spectateur est alors embarqué dans une histoire qui emprunte à tous les genres. Théâtre, récit initiatique, et parfois même conte fantastique, cette série questionne, autant qu’elle célèbre, la maternité.

Lorsque les trois filles de Nona ; Manu, Gabi et Georges (respectivement incarnées par Virginie Ledoyen, Clotilde Hesme, et Valérie Donzelli), 44 ans, apprennent la grossesse de leur mère de 70 ans, la décision est immédiate : retour dans l’appartement familial de la rue Poulet à Paris, au cœur de la Goutte d’Or ! Les filles retrouvent leur chambre, leurs souvenirs, pour épauler leur mère qui vit un bouleversement dans son corps et dans son esprit.

On assiste alors à un huis clos aussi poétique que fantasque. L’appartement aux accents 60’s devient le décor d’une multitude de remises en question, provoquées par cette grossesse impromptue. Chacun des personnages s’engage dans une transformation intérieure dont on est le témoin.

Le récit est rythmé par la douce voix de Miou Miou, qui narre à merveille cette histoire dont elle est le héros. On rit, mais on pleure aussi. Moment de grâce ultime au 7ème épisode… Emotion garantie avec la puissante tirade féministe de Nona. 

RDV sur Arte sans plus attendre !

Le petit plus ? La musique de Joan Baez qui nous berce du début à la fin, avec son célèbre tube « Donna, Donna… »

Disponible sur : https://www.arte.tv/fr/videos/RC-021464/nona-et-ses-filles/

Âme russe à Paris : la Collection Morozov à la Fondation Vuitton

Vous vous souvenez sûrement de la Collection Chtchoukine exposée à Paris à l’automne 2016… La Saga des collectionneurs russes continue ! C’est désormais la Collection des Frères Morozov qui occupe les galeries de la Fondation Vuitton.

Jusqu’au 22 février, on peut admirer le 2nd volet du diptyque Icônes de l’Art Moderne. Car oui, les deux expositions ont été pensées ainsi: un diptyque, des œuvres qui se répondent, un témoignage commun de l’art de collectionner au début du XXe siècle et des échanges artistiques entre la France et la Russie.

Dès les premières salles, le visiteur est invité chez Mikhaïl et Ivan Morozov, contemporains de Sergueï Chtchoukine. Près de 200 œuvres sont rassemblées, une première pour la collection qui n’avait encore jamais quitté la Russie.

Ils ont voyagé à Paris les frères Morozov… Monet, Renoir, Denis, Van Gogh, Gauguin, Cézanne, Picasso, Matisse… Grâce aux Salons, et au gré de leurs rencontres avec les marchands d’art, notamment Ambroise Vollard dont la figure est particulièrement célébrée, ils ont contribué à la reconnaissance internationale de ces artistes. Je suis toujours émerveillée de découvrir les liens entre les différentes figures de l’Histoire de l’Art à cette époque.

Parmi mes coups de cœur, le Triptyque marocain de Matisse. La vue de la fenêtre, Zorah sur la terrasse, et La porte de la casbah nous plongent dans un exotisme particulièrement désiré en 2021. J’aime ces vues de la fenêtre, si chères à Matisse, qui nous invitent à l’évasion. On peut s’amuser à voir un clin d’œil entre l’aquarium aux pieds de Zorah et les célèbres Poissons rouges de 1911, qui étaient exposés lors de l’exposition Chtchoukine.

A la fin de la visite, ne vous laissez pas décourager par les quelques minutes d’attente pour pénétrer dans la salle consacrée à La Ronde des prisonniers : une expérience quasi spirituelle vous y attend. Un rayon de lumière est projeté sur la toile et révèle la beauté et la puissance de ses couleurs. Avec cette œuvre de 1890, on rencontre Vincent Van Gogh alors qu’il est interné à l’asile psychiatrique de St Rémy. Loin de ses œuvres les plus célèbres, on nous offre ici un fragment de l’élan créateur du peintre, au crépuscule de sa vie. 

Informations pratiques : Fondation Louis Vuitton, du 22 septembre 2021 au 22 février 2022

Vincent van Gogh La Ronde des prisonniers, Saint Rémy, 1890 Huile sur toile 80 × 64 cm Musée d’État des beaux arts Pouchkine, Moscou

CAMILLE CHU

Paris brûle-t-il ? Huang Yong Ping et Shen Yuan à la galerie kamel mennour

En 2019, le monde de l’art contemporain français et asiatique fut ébranlé par la mort de Huang Yong Ping, artiste français d’origine chinoise et fondateur du mouvement « Xiamen Dada » dans les années 1980.

C’est un bel hommage que lui rend la galerie kamel mennour avec l’exposition « Huang Yong Ping, Shen Yuan, Is Paris Burning? 2019 », ouverte le 9 décembre et clôturant l’année 2021 avec brio. Elle tisse et retisse le dialogue qui ne s’est jamais vraiment rompu entre l’artiste décédé et sa compagne, Shen Yuan. La poursuite d’un échange créatif pour une ultime exposition en duo à Paris, leur ville d’adoption depuis plus de trente ans. 

La question de la référence résonne au fil de l’exposition ; échos aux deux cultures – française et chinoise – dans lesquelles le couple d’artistes puise leurs inspirations, clins d’oeil à d’autres artistes comme Marcel Duchamp, hommage naturel aux projets de Huang Yong Ping qui ont marqué son oeuvre. 

Enfin, référence au livre Paris brûle-t-il? de Dominique Lapierre et Larry Collis. Car si Paris est la ville de l’amour, c’est également le berceau de la révolution. Et cette idée de révolution, nous la retrouvons dans les œuvres l’exposition, par exemple dans l’évocation de parapluies au sein d’une installation de Shen Yuan, en écho à la révolution des parapluies de Hong Kong en 2014. 

Paris est-il réellement en train de partir en flammes ? La pièce monumentale de la reconstitution de la flèche de Notre-Dame, trônant au milieu de l’espace de la galerie, nous interroge. 

Informations pratiques : galerie kamel mennour, du 9 décembre 2021 au 29 janvier 2022

L’explosion des NFT dans l’art

Vous pensiez échapper à un flashback culturel de l’année 2021 sans parler de la montée des NFT dans l’art ? Opérons un petit retour sur cette actualité mêlant les toutes dernières tendances technologiques et les créations artistiques à la pointe de l’innovation.

Un NFT, un non-fungible token, est un jeton numérique basé sur la technologie de la blockchain. Sa particularité ? Il est non-fongible et donc, non-interchangeable, contrairement aux crypto-monnaies (Bitcoin, Ethereum…). Son application dans le secteur de l’art est donc très intéressante ; le NFT permet notamment d’attester une forme d’authenticité et de rareté. 

Son arrivée dans l’art n’est pas une nouveauté. Les digital et crypto-artists s’étaient déjà intéressés depuis quelques années aux NFT pour créer et innover. L’idée étant d’associer une œuvre d’art (une image, un gif, une vidéo ou toute autre forme) à un jeton pour le rendre unique et infalsifiable. 

Mais le point de départ de l’explosion des NFT dans le monde de l’art est récent et date de cette année. Avec la fameuse vente de Beeple en mars 2021, une seule œuvre numérique Everydays: the First 5 000 Days, une vente organisée par le géant Christie’s et un marketing surfant sur la tendance des NFT ont suffit pour atteindre un record absolu sur le marché de l’art.

L’association de l’art et les NFT ne s’arrête pas à une seule et unique vente d’art crypto qui a fait le buzz. C’est tout un écosystème culturel qui a été chamboulé. Depuis, une multitude d’idées et de projets se sont développés, notamment dans le monde des galeries. De l’ouverture à une galerie entièrement dédiée à l’art NFT à New York à la multiplication des départements digitaux dédiés à la question dans les plus grandes galeries (PACE, Almine Rech, Perrotin…), les idées et projets foisonnent. 

Le secteur muséal s’est également intéressé à la question ; la Galerie des Offices à Florence a vendu le Tondo Doni de Michel-Ange version NFT pour 140 000 euros, le British Museum s’est mis à vendre des NFT « cartes postales » d’estampes d’Hokusai à l’occasion d’une exposition dédiée, tout comme le musée de l’Ermitage a récolté plus de 440 000 dollars via une vente aux enchères d’oeuvres en NFT. Enfin, c’est tout un espace permanent dédié aux NFT qui ouvrira ses portes en janvier 2022, le Seattle NFT Museum (SNFTM), pour devenir le premier musée physique de la sorte. 

D’autres initiatives seront donc attendues dans le domaine en 2022. Et avec la popularisation du « métaverse », ce monde virtuel fictif ou le futur d’Internet, les frontières des galeries, des musées et de l’art ne cesseront de s’élargir, vers le digital et l’au-delà. 

L’équipe de Zao vous remercie pour votre lecture et pour votre soutien au cours de l’année 2021 et vous souhaite une nouvelle année pleine de richesse et de culture ! Nous nous retrouvons en 2022 !

La résidence Zao #2 – L’îlot causse Méjean

Partager le travail de créatifs qui nous fascinent est au cœur de ZAO ! Pour cette deuxième Résidence Zao, nous donnons carte blanche à Axelle Ponsonnet (@axellepons).

Fraîchement diplômée de l’école d’Architecture de Paris-Belleville, Axelle Ponsonnet a toujours entretenu une passion pour le dessin. Couplée à sa soif d’aventure et son amour pour les grands espaces, ses créations sont le plus souvent inspirées des lieux qu’elle a visités. Elles oscillent entre croquis, dessins d’architecture et réalisations davantage expressives et oniriques, multipliant les techniques et médium, du graphite à la linogravure en passant par l’aquarelle et l’encre. Son apprentissage de l’architecture a joué un rôle significatif dans sa pratique, cherchant non seulement à représenter mais surtout à questionner le façonnement économique, politique et écologique des espaces.

Par cette carte blanche, Axelle Ponsonnet nous plonge dans ses souvenirs de vacances loin de la ville, au cœur de la Lozère.

Les terres de pâturages abandonnées sont recouvertes petit à petit par les forêts qui gagnent du terrain.

« Ces dessins sont extraits de la série L’îlot causse Méjean. Ils visent à retranscrire l’expérience d’un paysage. Mélange de recherches de terrains, de références à la cartographie classique mais aussi de souvenirs, ce travail dresse un portrait écologique d’un territoire isolé.

Entre paysages steppiques et gorges spectaculaires dessinant l’îlot, le causse Méjean renvoie l’image illusoire d’un territoire qui aurait été préservé des problématiques modernes d’aménagement. Au-delà du mythe de la wilderness, cette nature dite originelle, le causse méjean porte en réalité les empreintes d’une exploitation de sa végétation et de ses sols par l’homme depuis des siècles.

Les falaises sont aussi des paysages qui ont été marqués par l’abandon. Interface historique entre les vallées et le plateau, ces versants étaient traversés par d’innombrables chemins aujourd’hui à l’état de friche, mais dont les traces sont encore visibles. Jamais retranscrit dans les cartographies classiques, ce maillage très dense de chemins s’est transmis jusqu’à aujourd’hui entre les générations par la parole,  révélant une histoire habitée du territoire.
Sur les hauteurs du plateau, l’eau est rare mais elle laisse des traces. Depuis des millénaires, elle s’infiltre dans les fractures, dissout la roche calcaire et dessine les contours d’un monde souterrain complexe jusqu’aux sous-sols de la vallée. 

Plaidoyer pour un art d’observer l’existant et y déceler des indices, L’îlot causse méjean tente d’en révéler une autre histoire en dessinant les traces de la présence de l’homme, dissimulées dans les paysages. Le dessin devient alors un prolongement du regard et permet de retranscrire une nouvelle manière d’appréhender les problématiques des vivants ». – Axelle Ponsonnet

↓ Retrouvez sa carte blanche sur le compte Instagram de Zao Magazine. ↓

Netflix fait son cinéma

Nos accès à la culture se restreignant de jour en jour, nous passons davantage de temps sur les plateformes digitales, à tenter tant bien que mal de nourrir notre curiosité. 

Regarder Netflix est souvent synonyme de facilité, de binge watching de séries populaires qui ne nous apportent pas tant que ça. Alors oui, certes, on peut être tenté de regarder Lupin parce que le Louvre nous manque terriblement. Mais une fois passée la page d’accueil mettant en avant les derniers blockbusters, ce catalogue regorge de trésors. Nous avons ainsi sélectionné les films sur Netflix qui nous permettent d’allier au maximum couvre-feu et culture. Encore faut-il y avoir un abonnement, sinon, négociez des codes !

Les classiques

Le Mépris (1963), Jean-Luc Godard

Jean-Luc Godard parmi les chefs-d’œuvre ? Pas très original me direz-vous. Mais on oublie trop souvent de revoir nos classiques sur Netflix. L’histoire de cette adaptation d’un roman de  Moravia est simple : elle met en scène les tensions du couple Camille et Paul (Piccoli et Bardot ) alors que celui-ci réalise une adaptation cinématographique de L’Odyssée aux côtés de Fritz Lang (dans son propre rôle) sous la pression d’un producteur cupide et goujat (Jack Palance). Dans  l’atmosphère surexposée de la villa Malaparte règnent les non dits, Paul semble prêt à sacrifier sa femme et sa crédibilité artistique pour satisfaire l’Américain.

C’est l’occasion de découvrir par ce chef-d’oeuvre le propos de Godard sur le cinéma lui-même, le réalisateur citant André Bazin dans le générique audio : « Le cinéma substitue à notre regard un monde qui s’accorde à nos désirs », y ajoutant « Le Mépris est l’histoire de ce monde ». 

Pierrot le fou (1965), Jean-Luc Godard 

“Qu’est-ce que je peux faire? J’sais pas quoi faire !” Regardez donc Pierrot le Fou, disponible sur Netflix !  Notre liste des incontournables du cinéma ne serait complète sans le couple Jean Paul Belmondo – Anna Karina formé par Jean-Luc Godard. Suite à des ennuis avec un groupe de gangsters, le couple part en cavale à travers la France, s’aventurant jusqu’aux côtes de la Méditerranée.

On y retient le jeu des couleurs : la fine cravate de Ferdinand, ses carnets de notes, la peinture qu’il étale sur son visage, ou encore les reflets des lampadaires sur le pare-brise dans la nuit. 

Peau d’âne (1970), Jacques Demy

Peau d’âne a bercé l’enfance de nombreux d’entre nous, mais ce chef-d’œuvre est à découvrir à tout âge, offrant autant d’interprétation que de point de vue. Reprenant le récit de Charles Perrault, Jacques Demy nous offre sa vision du conte médiéval, merveilleux, fantasque, parsemé d’anachronismes. Sur une musique originale de Michel Legrand, ce film reprend le format de la comédie musicale, rappelant d’autres bijoux du réalisateur, Les demoiselles de Rochefort et Les Parapluies de Cherbourg, à découvrir également sur Netflix. 

Les animés

Le voyage de Chihiro (Sen to Chihiro no kamikakushi, 2001), Hayao Miyazaki

La Maison espagnole Loewe présentait récemment une collaboration avec le Studio Ghibli, studio d’animation japonais fondé par Hayao Miyazaki et Isao Takahata, autour du film Mon voisin Totoro. Voici alors une nouvelle occasion de se plonger dans l’univers de Miyazaki. On retiendra notamment pour notre sélection les deux heures cinq de rêverie qu’offre le fantastique Voyage de Chihiro, récompensé de l’Oscar du meilleur film d’animation en 2002. Suivez Chihiro dans son odyssée vertigineuse, relever chacun des défis se présentant à elle, comme autant de représentations de thématiques contemporaines intriguant le réalisateur. 

La Princesse Mononoké (Mononoke hime, 1997), Hayao Miyazaki

Enfant, je regardais en boucle ce film et aujourd’hui je ne m’en lasse toujours pas. La finesse du dessin d’Hayao Miyazaki atteint pour moi son apogée dans les paysages poétiques de ce Japon empreint de récits mythologiques autant que d’enjeux liés à l’industrialisation. La complexité des personnages et l’absence totale de manichéisme fait la richesse de cet animé relatant la quête d’Ashitaka pour guérir de la malédiction qui le ronge. Un conte entre nature et culture, entre tradition et modernité, qui ne cessera jamais de m’émerveiller. 

Your Name. (Kimi no na wa., 2016), Makato Shinkai 

Sortons des sentiers battus des films de Miyazaki pour rejoindre un autre chemin qui gagne à être exploré par le grand public français ; ceux des films animés de Makoto Shinkai. Ce réalisateur, que l’on appelle d’ailleurs “le nouveau Miyazaki”, propose avec Your Name. un bijou de l’animation japonaise, autant sur la forme que le fond. Les dessins frôlent la réalité, en représentant jusqu’au détail près les paysages urbains de Tokyo à la campagne du Japon. On y voit même du lens flare (les cercles lumineux dû au reflet du soleil que l’on retrouve sur certaines photos) lors de plans sur un beau ciel bleu ou un coucher de soleil. Débutant innocemment par deux jeunes adolescents qui échangent leur corps un beau matin, la tournure que ce film prend à mi-chemin laisse à réfléchir sur des thèmes plus profonds. 

Cinéma contemporain

Marriage Story (2019), Noah Baumbach

Ce film signé par Noah Baumbach et produit par Netflix, nominé pas moins de 77 fois aux Golden Globes, est une pépite du géant américain de la VOD partie à la conquête du Cinéma avec un grand C. Le réalisme et la simplicité du scénario, consacré au divorce d’un metteur en scène (Adam Driver) et de sa comédienne favorite (Scarlett Johansson), met en valeur un jeu d’acteur sans excès mais très touchant. Avec une profonde bienveillance sur les personnages, Baumbach pose un regard  très émouvant sur la famille moderne.

Call Me By Your Name (2017), Luca Guadagnino

Face à Call Me By Your Name, on a le sentiment de bronzer, de s’évader dans l’Italie de 1983 en glissant sur la bande son solaire de Sufjan Stevens. On plonge sans hésiter dans ce récit initiatique vers la découverte du désir du jeune Elio (Timothée Chalamet), sa passion pour Oliver (Armie Hammer).

Outre un magnifique film sur l’adolescence et les amours queer incandescents, Luca Guadagnino y pose une réflexion anthropologique sur les héritages culturels. Il y a dans le rapport très humain à l’archéologie entretenu par le Professeur Perlman (Michael Stuhlbarg) comme une continuité entre la civilisation gréco-romaine et monde d’Elio et sa famille, qui contraste avec celui d’Oliver, l’Américain visiblement issu d‘un milieu conservateur dont il s’échappe pour cette escapade estivale avec le spectateur.

Mommy (2014), Xavier Dolan

Comment ne pas évoquer Xavier Dolan au sujet du cinéma contemporain ? Et bonne nouvelle : une partie de ses longs-métrages sont sur Netflix : Juste la fin du monde, Tom à la ferme, Les Amours imaginaires, et l’incontournable Mommy. Vivez au plus près de Diane, veuve, qui se met au défi de prendre la garde de son fils violent et turbulent, Steve, expulsé de son centre de rééducation.  Dans un temps suspendu, se crée l’espérance d’un équilibre retrouvé entre la mère et le fils, aidé par leur voisine, Kyla.

Partageant cette aventure, ce film nous place au plus près des émotions des personnages, des pulsions violentes de Steve à l’allégresse générale de cette utopie. Transportés par une bande son soignée, vous ne danserez plus jamais de la même façon sur du Céline Dion.

L’hiver de la culture

A défaut de pouvoir les visiter, Zao vous propose de retrouver en images les grands événements culturels et expositions avortés, raccourcis, reportés de fin 2020/début 2021.

Une façon de mettre en lumière ces projets, en espérant de les découvrir de nos propres yeux prochainement !

« Thierry Mugler : couturissme  » au @madparis

Alan Strutt, Yasmin Le Bon (Londres, 1997). Collection La Chimère, haute couture automne-hiver 1997-1998
© Alan Strutt

Sur les traces de la figure singulière qu’est le couturier Thierry Mugler, l’exposition retracera son oeuvre, ses créations, son imaginaire.

Initialement prévue en octobre 2020, reportée à une date ultérieure non communiquée.

« Matisse, comme un roman » au @centrepompidou

Henri Matisse, « La Blouse roumaine », 1940. Centre Pompidou, Musée national d’art moderne. Don de l’artiste à l’État, 1953 © Succession H. Matisse Photo © Centre Pompidou, Mnam-Cci / G. Meguerditchian / Dist. RMN-GP

Ouverte une poignée de jours avant le deuxième confinement,  le Centre Pompidou rend hommage à Matisse, retraçant les débuts du jeune artiste, tard venu à la peinture dans les années 1890, jusqu’à la libération complète de la ligne et de la couleur avec les gouaches découpées.

Inaugurée en octobre 2020, réouverture incertaine.

« Picasso – Rodin » au @museerodinparis et @museepicassoparis

Pablo Picasso, “Le Baiser”, Mougins, 26 octobre 1969, Huile sur toile, 97x130cm, Musée national Picasso-Paris (c) Succession Picasso / Auguste Rodin, « Le Baiser », vers 1885, plâtre patiné, 86 x 51,5 x 55,5 cm, Paris, Musée Rodin

Si les musées ne rouvrent pas en février (et nous n’y croyons malheureusement pas non plus), il faudra patienter quelques temps avant de contempler la confrontation du travail de Auguste Rodin (1840-1917) et Pablo Picasso (1881-1973). Déclinée simultanément au musée national Picasso-Paris et au musée Rodin, un format original que Zao salue, l’exposition permettra de découvrir un dialogue entre les deux monstres sacrés de l’art du XIXe.

Initialement prévue du 9 février au 18 juillet, maintien, annulation ou report de l’exposition non communiqués pour le moment.

« Le Corps et l’Âme. De Donatello à Michel-Ange. Sculptures italiennes de la Renaissance » au @museelouvre.

Organisée avec le musée du Castello Sforzesco de Milan (@castellosforzescomilano), l’exposition présentait plus de 140 oeuvres de la moitié du Quattrocento jusqu’au 16ème siècle, l’apogée de la sculpture de la Renaissance. On pouvait y admirer notamment des chefs-d’oeuvre sculpturale des collections du musée comme l’Esclave mourant de Michel-Ange.

Initialement prévue du 22 octobre 2020 au 18 janvier 2021.

L’ouverture de la Bourse de Commerce (@boursedecommerce)

Bourse de Commerce-Pinault.
© Patrick Tourneboeuf – Courtesy Bourse de Commerce-Pinault Collection

La grande inauguration de la Bourse de Commerce, qui présentera la Collection Pinault au sein du monument classé parisien, a été reportée une nouvelle fois à l’aube du deuxième confinement, à cause de l’impossibilité des lieux culturels à rouvrir.

Le tout dernier temple de l’art contemporain devait ouvrir ses portes en juin 2020, puis au printemps 2021, pour enfin décaler son inauguration le 23 janvier 2020. Travaux terminés, le musée est prêt à accueillir les publics : « Waiting for the green light… » peut-on lire sur son compte Instagram.

FLASHBACK CULTUREL : CE QUE NOUS RETENONS DE 2020

2020… par où commencer? Nous n’avons pas besoin de rappeler en quoi cette année aura été si particulière pour tous, si difficile pour le monde de la culture. L’équipe de Zao Magazine revient tout de même sur les manifestations culturelles qui l’ont le plus marquée.

ARIANE DIB

The show must go on : Ondine à la Comédie Française, captée en 1974

Pendant le confinement du printemps dernier, la Comédie Française a maintenu sa programmation culturelle en s’adaptant aux contraintes : tous les soirs des pièces filmées issues de leurs archives étaient retransmises en live (via facebook et leur site internet). Parmi ce théâtre de fauteuil d’un nouveau genre, était diffusée Ondine de Jean Giraudoux, une pièce relatant le parcours d’une jeune “femme” capable de contrôler les éléments notamment liés à l’eau, abandonnant son lac pour suivre l’homme qu’elle aime à la cour, Hans, un jeune gentilhomme autrefois promis à une autre. Cette mise en scène conservait la beauté du texte et mêlait le regard et l’humour de Giraudoux et le romantisme bavarois dont est originaire le mythe d’Ondine. Le jeu des acteurs est incroyable, notamment le magnétisme d’Isabelle Adjani et Jean-Luc Boutté. Cette initiative pour rassembler le temps d’une pièce, même à distance, des spectateurs éparpillés et confinés, m’a parue extrêmement pertinente et réussie.

Ondine, Jean Giraudoux, mise en scène de Raymond Rouleau ; pièce en 3 actes de Jean Giraudoux ; spectacle de la Comédie-Française ; décors de Chloé Obolensky ; costumes de Chloé Obolensky, Rostislav Doboujinsky, retransmission le 29 avril 2020, vidéo issue des Archives de la Comédie Française. Crédit photo Nicolas Treatt

Voyage en terres inconscientes : Laure Prouvost, Deep See Blue Surrounding You / Vois ce bleu profond te fondre, Les Abattoirs, Toulouse, du 24 janvier au 20 septembre 2020

2020 fut une année complexe, à la fois rythmée par un besoin plus pressant que jamais de s’échapper de la réalité ou de la supporter par les œuvres d’art, et une année où il fût parfois difficile d’y accéder. Je me permets donc de tricher quelque peu en me remémorant ma visite toulousaine de l’œuvre Deep Blue Surrounding You, créée par Laure Prouvost pour le pavillon français de la Biennale de Venise de 2019 sous le commissariat de Martha Kirszenbaum. Je triche car je n’ai pas pu la voir à Venise mais je me suis réjouie de l’avoir découverte au musée des Abattoirs de Toulouse. Il s’agit d’une œuvre mixte, mêlant  installation, vidéo, sculpture, musique au lexique de l’eau, mais aussi à associations inconscientes et poétiques.

On embarque dans un parcours initiatique, une odyssée ou bacchanale aux airs surréalistes, menant de jeunes artistes de la région parisienne à Venise.  On repère les étapes de ce voyage : le quartier Pablo Picasso de Nanterre, le Palais Idéal du Facteur Cheval,…  On s’oublie et on traverse des contrées brumeuses, bien connues ou imaginaires.

« Un voyage vers notre inconscient. À l’aide de nos cerveaux situés dans nos tentacules, nous creuserons des tunnels vers le passé et le futur en direction de Venise. Suivons la lumière. » Laure Prouvost

Pour aller plus loin : L’art et la Poudre, Aware, Interview de Laure Prouvost et Martha Kirszenbaum

Fenêtre sur Instagram : Per Adolfsen

Là encore je ne joue plus vraiment selon les règles, une page Instagram n’étant pas forcément à proprement parler une manifestation culturelle … mais au cours de cette année recluse, les réseaux sociaux ont comblé un manque d’accès à l’art et à l’évasion. Ainsi, les paysages colorés et poétiques de Per Adolfsen ont été une véritable respiration, un accès, certes éloigné, à un monde extérieur et à une vision de la beauté quotidienne et humbles de la nature. Les compositions aux crayons de couleurs de cet artiste danois sont simplement belles. 

CAMILLE CHU

Retour sur Le Supermarché des Images au Jeu de Paume

L’ouverture de la Collection Pinault à la Bourse de Commerce, l’exposition Matisse au Centre Pompidou, l’exposition Marc Riboud au Musée Guimet… Ce sont tant de choses que j’aurais aimé ajouter à ce flashback culturel, mais coronavirus oblige, on se contentera des quelques temps forts de la culture qui ont quand même pu marquer cette année 2020.
Parmi les expositions que je retiendrai, Le Supermarché des Images au Jeu de Paume. Abordant les enjeux de la surproduction des images et leur stockage, leur diffusion, leur partage dans notre société, l’exposition faisait dialoguer des artistes aussi impressionnants que surprenants. Les œuvres de Kazimir Malévitch, Yves Klein, Sophie Calle, Evan Roth, Geraldine Juárez et bien d’autres étaient au rendez-vous pour se répondre dans l’espace d’exposition, se contredire dans leurs formes, et s’accorder dans leurs valeurs. Un véritable supermarché dans lequel on ne pouvait que faire le choix d’apprécier les œuvres, la scénographie et la médiation.
Et cette exposition était tombée à point nommé : j’ai l’ai visité quelques jours avant le premier confinement, soit avant la fermeture du Jeu de Paume pour un an… Et avant d’être submergée par le flot d’images des réseaux sociaux et des écrans que l’enfermement chez soi nous imposait.

Compléter son propre musée dans Animal Crossing New Horizons

Animal Crossing New Horizons, un jeu du géant Nintendo, est lui aussi tombé à pic. Sorti le 20 mars 2020, quelques jours après l’annonce du premier confinement en France, le jeu était très attendu par les nombreux joueurs de console Switch dont je fais partie.
Si Animal Crossing New Horizons apparaît aujourd’hui dans ce flashback culturel c’est parce qu’au-delà d’être de l’art en soit, le jeu m’a permis de revoir mes classiques en termes d’Histoire de l’Art. Grâce au Musée implanté dans le jeu, les joueurs ont la possibilité de compléter la collection de la galerie d’art avec des peintures, des sculptures et même des estampes. Pour se faire, il faut acquérir des chefs-d’oeuvre sur le marché noir. Mais la chose n’est pas si simple : il faut parvenir à reconnaître les vraies œuvres parmi les fausses présentées. Les contrefaçons ont toujours un détail qui les trahit, comme un sourire à l’envers, une couleur erronée, des personnages manquants ou un objet en trop.
Nintendo ne vous fait pas de cadeaux, il faut avoir une solide connaissance des chefs-d’œuvre (ou une bonne connexion wifi pour trouver l’original sur Google Image) si vous voulez espérer compléter votre collection.

Faites l’expérience par vous-même en suivant ce lien !

CONSTANT DAURÉ

L’avènement des discussions live sur Instagram

2020 sera marquée par cette nouvelle manière de converser, un nouveau format de conférence : le direct Instagram.

Je me souviens d’ailleurs très bien, pendant le confinement du printemps, de la première masterclass à laquelle j’ai assisté de cette façon-là, le 7 avril. L’ECAL, école d’art et de design suisse, s’est adaptée en retransmettant en live sur Instagram la conversation entre l’un de ses enseignants, Lionel Baier et le légendaire Jean-Luc Godard. J’ai été ainsi interpellé par cette figure, traversant les époques, fumant son cigare derrière la caméra, frontale cette fois-ci.

J’ai été marqué par cet évènement ; et j’ai trouvé cette image retransmise du cinéaste très forte. J’en ai fait une capture d’écran, et quelques semaines plus tard, j’ai compris que je n’avais pas été le seul à avoir été saisi : le peintre Guy Yanai, travaillant le plus souvent à partir de photographies, en avait fait un tableau :

Guy Yanai, Jean-Luc Godard (Instagram), 2020

Les conversations Instagram ont été nombreuses et très enrichissantes. Je pense notamment aux talks menés par Jean-Charles de Castelbajac, nous invitant à partager ses conversations avec ses amis, revenant sur leurs carrières ou évoquant leur ressenti sur ces temps troublés. J’ai particulièrement apprécié les discussions avec Michel Gaubert, Agnès B, Alexandre de Betak, Tom Sachs, ou encore Mathieu Lehanneur qui m’a permis de découvrir son travail.

Le grand retour de Sébastien Tellier

L’année commençait pourtant bien : janvier 2020, le génial Sébastien Tellier sort le titre A ballet, annonçant son grand retour après 6 ans d’absence, par un nouvel album intitulé Domesticated et une série de dates de concert.

Mais le nom de l’album, si vous me permettez le jeu de mot, semble avoir rattrapé le musicien : le confinement général a cloitré chacun chez soi, provoquant le recul de sa sortie, mais également le report de ses concerts pour un futur incertain.

Domesticated sera finalement dévoilé le 29 mai, livrant une musique électronique cosmique, vaporeuse et sensible qui sera la bande son de mon été. Relevons d’ailleurs que les influences artistiques de Sébastien Tellier sont riches, le morceau Venezia ayant été enregistré au sein du Pavillon français de la Biennale de Venise 2017, dans l’installation Studio Venezia de Xavier Veilhan.

Les salles de concert demeurant fermées, vivre un concert de Tellier en 2020 était inespéré, jusqu’à l’annonce du concert Arte, capté au cœur de la Gaité Lyrique le 13 novembre 2020. Mêlant ses classiques, tels que La Ritournelle ou Roche, à ses nouveaux morceaux, Sébastien Tellier nous livre une performance magistrale, accompagné de plusieurs musiciens. Il rendra un hommage à son ami Christophe avec Juliette Armanet, en partageant une réinterprétation de sa Dolce Vita. Comme le souhaitait Sébastien Tellier, ce concert nous a permis de souffler quelques instants, nous transportant loin du chaos que nous vivons. À écouter en boucle.

Habiter la forêt, ce que j’aurais souhaité pour 2020.

Les visites d’expositions au musée ont été rares cette année… Et le rôle de la galerie en tant qu’institution culturelle s’est plus que jamais fait sentir, accueillant chacun gratuitement entre ses murs pour présenter le travail d’artistes de tout horizon.

 C’est ainsi que je retiendrai de 2020 l’exposition à la galerie Nathalie Obadia Habiter la forêt de Fabrice Hyber, artiste dont j’apprécie l’univers et le travail. 

Fabrice Hyber, Abri, 2020

Cette exposition s’inscrit bien dans les évènements que nous avons vécus : 2020 aura été l’année de la distanciation, de la redéfinition de nos habitudes, de la redécouverte des espaces que nous habitons. Si certains ont pu quitter la ville pour se mettre quelques semaines au vert, d’autres y sont restés, rêvant sans doute de grands espaces et d’air frais. 

Fabrice Hyber ne nous livre pas seulement une vision lyrique de la forêt, comme lieu de ressource et d’émerveillement, mais une nature à l’origine d’innovation et de technologie, permettant de relever le défi écologique qui s’offre à nous. Entre schémas et dessins, à travers un fourmillement de fusain et un large nuancier de couleurs vives, c’est en observant la nature que l’artiste propose dans ses toiles une vision utopique de la ville, résolument tournée vers un espoir d’écologie.

Bonne nouvelle, cette exposition se prolonge en 2021 : vous avez jusqu’au 23 janvier pour la (re)découvrir !

Fabrice Hyber, Habiter la forêt, jusqu’au 23 janvier 2021, Galerie Nathalie Obadia, 18 rue du Bourg-Tibourg 75004 Paris

MATHILDE PRÉVOTAT

Les Kienholz dénoncent ! Ed & Nancy Kienholz, 5 septembre – 31 octobre 2020, Paris – Grenier Saint Lazare

43 ans après la dernière grande rétrospective française dédiée à Edward Kienholz, la Galerie Templon a présenté de septembre à novembre, des œuvres d’ Edward et de son épouse Nancy.  L’occasion pour nous de redécouvrir ces artistes décidément trop peu exposés en France ! 

Les œuvres de Kienholz sont généralement classées dans le Pop Art même si elles sont très loin des œuvres aux couleurs acidulées représentant la société de consommation. Au contraire… leurs œuvres sont pour le moins morbides et provoquent un sentiment de malaise chez le spectateur. Sentiment accentué par le fait que leurs installations sont grandeur nature. L’on se retrouve ainsi devant des scènes d’abandons d’enfants devant Jody, Jody, Jody, ou devant des scènes de viol devant The Pool Hall, une installation représentant des hommes jouant au billard, visant le sexe ensanglanté d’une femme décapitée. 

Les Kienholz voulaient choquer pour mieux dénoncer. Pari réussi! Tous les travers de la société américaine y passent : sexisme, abus sexuel, racisme etc. Triste constat : ces œuvres créées entre 1978 et 1994, sont toujours d’actualité. 

Kienholz,The Pool Hall, 1993

GIRL POWER ! Hong Sang-soo, La femme qui s’est enfuie

Gam-Hee (interprétée par Kim Minhee) rencontre et converse avec trois de ses amies, son mari qu’elle ne quitte jamais, étant en voyage d’affaires. Si le scénario parait simple voire banal, le réalisateur coréen Hong Sang-Soo nous offre avec La femme qui s’est enfuie un film juste et mélancolique. 

Les images sont splendides. La beauté réside dans la simplicité des plans fixes, interrompus régulièrement par des zooms sur ces femmes qui conversent. Ces dernières sont quant à elles interrompues par des hommes, véritables intrus. Les hommes n’ont en effet qu’une place anecdotique dans ce triptyque de rencontres, venant perturber, succinctement les conversations avec des interventions ridicules, grotesques. Finalement, Hong Sang-soo offre un véritable hommage aux femmes avec ce film court (seulement 1h20!).

Ce film est poétique, parfois drôle, toujours sensible, à voir !

Zaomagazine fête son premier anniversaire; c’était un plaisir de passer cette année avec vous, merci pour votre lecture et pour votre soutien. Nous nous retrouvons en 2021!

La résidence Zao #1 – Le passage d’arcus

Vous le savez, Zao Magazine est résolument tourné vers l’art : nous nous intéressons aux manifestations culturelles, à l’actualité des galeries et à l’avenir de notre patrimoine. Mais nous essayons toujours aussi de garder un œil sur la création contemporaine, au sens large.

Et très souvent, il nous brûle d’envie de partager le travail des plus talentueux. C’est pourquoi nous avons décidé de créer la Résidence Zao, terme un peu audacieux mais par laquelle nous souhaitons donner carte blanche à un créatif le temps de quelques posts pour présenter un contenu exclusif.

Si nous avions rencontré Armande Gallet pour évoquer son travail de commissaire d’exposition avec son association étudiante, c’est aujourd’hui son travail d’illustratrice que nous souhaitons mettre en avant. Dans ce domaine, Armande est une autodidacte : le dessin est pour elle une passion, à laquelle elle se dédie lorsqu’elle a du temps libre pour se concentrer et créer. Son carnet de croquis est une suite d’expérimentations : gouache, aquarelle, crayon de couleur ou feutre noir, elle explore différents univers. Ses dessins tiennent en général sur quelques centimètres.

A l’échelle de sa main, un petit monde se déploie : projections mentales dans des paysages fictifs, épiphanies du quotidien et mythologies personnelles se mélangent entre les pages du cahier. Pour la Résidence Zao, elle nous transporte dans son univers par une série de dessins intitulée « Le passage d’Arcus ». 

↓ Retrouvez sa carte blanche sur le compte Instagram de Zao Magazine. ↓

Confinés mais cultivés ! Les idées culturelles à faire pendant le confinement

On dit que l’art est une source d’inspiration, d’escapade et de voyage. Face au confinement du pays jusqu’à nouvel ordre, c’est l’art qui nous permettra de rester actifs et de ne pas sombrer dans l’isolement. Alors, faisons de cette période d’enfermement une opportunité pour (re)découvrir la culture sous toutes ses formes. Pour Zao, le confinement n’est pas synonyme d’enfermement, d’isolement ou de déconnexion, au contraire. Nous vous avons préparé une liste des choses culturelles à faire, à voir ou à découvrir depuis chez vous, une liste que nous continuerons d’alimenter au fil des jours. Restons ouverts, restons connectés ! 

© Jose Manuel Ballester, Lugar para un nacimiento. 2012, digital print on canvas, 68,11 x 109,25 inch.

• VOIR •

• Se refaire une culture cinématographique 

C’est le moment de regarder tous les films que vous avez noté dans un coin, et au passage, de se refaire une culture cinématographique. Pour cela, il y a des plateformes comme la Cinetek, un site de VOD (vidéo à la demande) consacré aux plus grands films du XXème siècle avec des films choisis par des réalisateurs du monde entier, ou Mubi, un service de streaming qui ajoute un film par jour allant des perles oubliées aux nouveautés tout droit sorties des festivals. Pour des films un peu plus originaux, nous vous recommandons Outbuster, un portail de cinéma à la demande dédié à tous ces films qui n’arrivent jamais dans vos salles (pour des mauvaises raisons).

• Se perdre sur Arte

Netflix, c’est bien. Arte, c’est mieux ! Documentaires, fictions, séries, animations… Que ce soit en replay gratuit ou en VOD, la chaîne franco-allemande vous propose une offre variée et réfléchie sur des sujets toujours plus intéressants. Parfait pour se cultiver en période de confinement. 

• Parcourir l’offre de la cinémathèque de Milan

Pour les amoureux de l’Italie, la cinémathèque de Milan met son catalogue en libre accès pendant la période de confinement. Ainsi, vous pourrez visionner plus de 500 films gratuitement en streaming. Des films italiens ou muets qu’il vous tarde de découvrir.

Tirer le meilleur de Netflix

Il y a quand même du bon sur Netflix : nous pensons notamment à At Eternity’s Gate de Julian Schnabel, un biopic consacré aux derniers jours de Vincent Van Gogh ou encore au très poétique Marriage Story de Noah Baumbach (nominé pas moins de 77 fois aux Golden Globes),  qui relate très humainement le divorce d’un couple. S’y trouvent également des documentaires intéressants comme la série Abstract : The Art of Design où l’on suit une personnalité d’une industrie créative différente à chaque épisode, de la scénographe Es Delvin au plasticien Olafur Eliasson.

• APPRENDRE •

Commencer un MOOC 

C’est le moment d’apprendre tout ce que l’on a toujours voulu apprendre et que l’on a jamais fait par manque de temps (et de motivation ?). Les MOOC sont une bonne solution, et notamment les MOOC culturels de la Fondation Orange qui propose sur sa plateforme des cours en partenariat avec le Centre Pompidou, la RMN-Grand Palais, et bien d’autres. 


Ecouter des podcasts sur l’art 

Les podcasts culture sont nos grands sauveurs durant ce confinement, surtout lorsqu’on vit seul, écouter une voix autre que la sienne est étonnamment réconfortant. Nous vous proposons plusieurs podcasts, courts ou longs, récents ou non, sur l’art classique ou la pop culture… Il y a en a pour tous les goûts.

“Quand ceux qui font l’art se racontent”, telle est la devise du Bruit de l’art, le podcast dédié à l’art contemporain lancé par Victoria Le Boloc’h-Salama et Florian Champagne. Ces deux jeunes historiens d’art interviewent en une trentaine de minutes artistes, critiques et commissaires.

Le Sens de la visite est un podcast récent qui vous prend la main pour vous emmener au sein des grands musées parisiens. Avec déjà deux épisodes au Louvre et à Orsay, découvrez les musées en les écoutant !

France Culture, c’est l’indispensable, le classique, l’essentiel du podcast. Parmi les programmes de la radio qui nous séduisent le plus, on y trouve l’Art et la Matière pour analyser les chefs-d’oeuvre, Soft Power sur l’actualité des industries culturelles et numériques et Fictions / Théâtre et Cie pour explorer le monde du théâtre.

Le podcast féministe La Poudre a notamment produit une série d’épisodes intitulés L’art et la Poudre dans lesquels Lauren Bastide invite des artistes de genre féminin de la pop culture (Juliette Armanet, Chris ou encore Clara Luciani) à l’art visuel (comme Laure Prouvost) en passant par les institutions culturelles (avec la conservatrice Camille Morineau). En une heure, ces personnalités vous décrivent leur parcours et leur rapport au féminisme.


• Suivre le hashtag #ConfinementMuséeURL sur Twitter

Lancé par Omer Pesquer sur le modèle du hashtage #ConfinementLecture (que nous recommandons également!), #ConfinementMuséeURL permet aux institutions et aux internautes d’échanger leurs ressources en ligne. Le Musée Saint-Raymond, la Cité des Sciences, le Musée de l’Armée… Les lieux culturels jouent le jeu et partagent sur Twitter toutes sortes de ressources en ligne. En anglais, ça donne #MuseumFromHome.

Réviser avec le Scribe Accroupi

Le bloggueur culture Scribe Accroupi bascule en [Mode Révision] et vous emmène faire une visite privée par jour. Nous avons déjà pu profiter des révisions de « Un rêve d’Italie. La collection du marquis Campana » au Louvre mais aussi « Osiris, mystères engloutis d’Egypte » à l’Institut du Monde Arabe. Ne manquez pas le départ de la prochaine visite !

Se promener avec le Musée d’Orsay

Les enfants ne sont pas en reste grâce au Musée d’Orsay qui met en place des Promenades Imaginaires leur faisant découvrir en quelques minutes des tableaux sous un nouvel angle ludique.

• Assister aux Masterclasses du Centre Pompidou

Sur sa chaîne Youtube, le Centre Pompidou vous permet d’assister à des Masterclasses en présence de grands cinéastes et metteurs en scène. David Simon, Amir Naderi, Richard Linklater… Au total, 14 vidéos qui composent une collection de masterclasses de référence dans le domaine du cinéma et des arts de la scène.

• VISITER •

• Découvrir UMA et ses expositions virtuelles fictives

UMA, c’est le musée universel d’art du futur. Muni d’un casque en réalité virtuelle ou non, parcourez des expositions fictives sur le street art, les chats, et même Léonard de Vinci… Un contenu diversifié, unique et original, pour le plus grand bonheur des fans d’expériences immersives ! 


• Visiter les plus grandes institutions culturelles du monde et leurs collections en ligne

De nombreux virtual tours sont accessibles en ligne pour que les internautes puissent découvrir les collections des plus grands musées. C’est le cas des visites virtuelles de la Frick Collection, des expositions en ligne du Smithsonian ou encore des visites thématiques du Louvre.

Dans un registre un peu plus old school, le musée de la photographie américaine vous fait une visite guidée à travers des texte, des liens à cliquer et des images.

Par ailleurs, de nombreuses bases de données ont été mises en ligne pour le plus grand plaisir des amoureux des objets d’art. On pense à la base de données du MET, et en France, à Paris Musées qui a récemment rendu accessible 150 000 oeuvres. 


• Voir des chefs-d’oeuvre numérisés sur Google Arts & Culture

Google Arts & Culture s’est associé avec plus de 500 musées et galeries pour proposer un accès immersif en ligne, gratuit, aux plus belles collections du monde ainsi qu’à d’autres contenus numériques. Du British Museum à Londres au Guggenheim à New York, en passant par le Van Gogh Museum à Amsterdam, vous n’aurez jamais autant voyager ! Nous avons eu un petit faible pour le Street View du Musée d’Orsay qui inclut les nouvelles salles rénovées du 5ème étage mais aussi pour le National Museum of Modern and Contemporary Art en Corée, un musée bien loin mais accessible depuis chez vous en ligne.

• Suivre les institutions culturelles sur les réseaux sociaux 

Les réseaux sociaux sont bien évidemment le moyen privilégié pour atteindre et engager le public à distance, l’ICOM nous l’a bien rappelé. On s’attend alors de la part des institutions culturelles à des visites guidées sur Facebook Live ou Instagram Live, des présentations de collections par Live Tweets ou simplement à du partage d’oeuvres et de documents sur les réseaux sociaux. 

La National Gallery of Art propose déjà des visites guidées, une salle à la fois, sur Twitter. Le musée national des arts asiatiques – Guimet a demandé à ses internautes quels contenus ils voudraient voir dans les prochaines temps. Le Château de Versailles, lui, vous offre un contenu plus ludique et vous défie avec 4 questions par jour pendant une semaine, à répondre sur Instagram.


Parcourir l’offre numérique de l’Institut nationale d’histoire de l’art (INHA) 

650 000 documents en ligne, 450 vidéos sur la chaine Youtube, 350 articles de la revue “Perspective : actualité en histoire de l’art”, de nombreuses publications numériques…. Il y a de quoi faire avec l’INHA ! Le fameux institut vous ouvre ses portes en ligne pour vous faire découvrir la richesse de l’histoire de l’art. 

• SORTIR AU THÉÂTRE •

Ecouter le journal de confinement de Wajdi Mouawad

Wajdi Mouawad, directeur du Théâtre National de la Colline et dramaturge exceptionnel, nous décrit son confinement quotidiennement avec une poésie mélancolique et magnifique. Son journal de confinement est disponible sur Soundcloud, à travers des épisodes sonores.

• ALLER À L’OPÉRA •

• Regarder des performances à la demande avec le Metropolitan Opera

The Metropolitan Opera vous propose Met Opera on Demand, pour regarder en streaming des centaines de performances enregistrées ou live. Suite à la crise sanitaire du coronavirus, l’institution a également mis en place les « Nightly Met Opera Streams » pour diffuser gratuitement, tous les soirs, des classiques de l’opéra : Carmen, La Bohème, La Traviata… L’opéra n’a jamais été aussi accessible !

Découvrir la 3ème scène de l’Opéra de Paris 

Créé en 2015, la 3ème scène de l’Opéra de Paris est une plateforme en ligne avec des courts métrages, des entretiens, des documentaires qui prolongent l’activité de l’institution et montre l’opéra sous un autre angle. On notera notamment la présence de Degas et moi d’Arnaud des Pallières, fiction d’une durée de 20 minutes consacrée à Edgar Degas.

• ECOUTER •

Ecouter les 7 heures de DJ set de Laurent Garnier

En réaction à la pandémie et ses conséquences sur les lieux de fêtes et de la nuit, Laurent Garnier a mis en ligne un DJ set de 7 heures, enregistré en novembre dernier à Contact (Tokyo, Japon).

• LIRE •

Relire ses classiques et découvrir ses contemporains

Qu’il s’agisse de redécouvrir vos classiques ou de vous plonger dans le dernier Prix Goncourt, lire a toujours été un moyen à porter de main pour s’évader. A une époque où tenir un livre entre ses mains, prendre le temps d’apprécier un papier, une couverture, est loin d’être une évidence, accueillons à bras ouverts le luxe de ce confinement. Voici quelques idées : 

Pour s’évader : Salammbô, Gustave Flaubert

Pour se rappeler la beauté du quotidien : Intimités, Felix Vallotton

Parce qu’on en a enfin le temps : Ulysses, James Joyce

Felix Vallotton, La Raison Probante, 1897, gravure sur bois, publié dans Intimités, 1897

Lire la presse en ligne, et gratuitement

De nombreux magazines et revues en ligne ont rendu leur contenu gratuit, le temps de ce confinement. C’est le cas du Quotidien de l’art qui vous offre un mois d’abonnement (il suffit d’envoyer un email avec le code TWITTER1MOIS à l’adresse abonnement@lequotidiendelart.com) et de Beaux-Arts Magazine qui propose un accès gratuit à toute son offre numérique.  

Plongez dans l’univers de la fantasy avec la Bibliothèque Nationale de France

La BnF prolonge sa saison Fantasy (et notamment son exposition sur Tolkien) sur vos ordinateurs. L’occasion de vous plonger au coeur d’un genre à l’esthétique et aux codes bien particuliers. Au rendez-vous : l’histoire de la fantasy, ses sources d’inspiration et ses adaptations dans le monde moderne, et même un jeu en ligne Le Royaume d’Istyald. Une démarche transmédia que nous saluons.

Emprunter des livres numériques aux bibliothèques de la Ville de Paris 

Si vous êtes adhérents des bibliothèques parisienne, n’oubliez pas que vous avez accès à la bibliothèque numérique de la Ville de Paris sur laquelle vous pouvez emprunter des livres en format numérique, mais également audio ou encore des films et documentaires.

• JOUER •

Jouer à Animal Crossing : New Horizons 

Animal Crossing : New Horizons pour Switch sort le vendredi 20 mars ! Le jeu vous emmenera sur une île déserte afin d’y construire sa maison, créer son village, bricoler des objets… L’occasion parfaite de penser à autre chose et de commencer une nouvelle vie.

• Parfaire sa culture gaming sur Youtube 

Concernant les jeux vidéos, il n’y a pas que des live-streams ou des let’s play sur Youtube ! Nous vous proposons de parfaire votre culture gaming grâce à des chaînes comme Game Next Door ou Homo Ludens qui analysent les jeux vidéos sous leurs aspects esthétiques et thématiques.

• EXPÉRIMENTER •

Parcourir l’espace virtuel du Jeu de Paume 

En première ligne de la création artistique en ligne et des cultures Internet, le Jeu de Paume vous présente son espace virtuel. Le principe ? Des projets d’artistes contemporains créées spécialement pour le web. L’art version 2.0. 

Découvrir des oeuvres et photographies randoms 

Chez Zao, on aime le hasard. C’est pour cela que l’on vous propose plusieurs sites et blogs qui vous permettent de découvrir à l’infini des oeuvres et photographies totalement randoms. La musée ou But does it float nous apparaissent comme des véritables mines d’images… 

• ÉCRIRE •

• Ecrire pour Zao !

Nous en profitons pour vous rappeler que Zao est un média participatif ! Si vous avez une idée de sujet culturel et que vous aimez écrire, n’hésitez pas à soumettre vos proposition à zaomagazine@gmail.com ou contactez nous sur la page https://zaomagazine.com/contact/

Enfin, nous vous souhaitons un bon courage à tou.te.s et espérons que ces idées culturelles vous permettront de surmonter cette période difficile.

Flashback culturel : ce que nous retenons de 2019

L’année 2019 s’achève et l’équipe de Zao Magazine revient sur ses évènements favoris, toutes manifestations culturelles confondues. 

ARIANE DIB

Conversation avec l’au-delà

Les Idoles, Christophe Honoré, au théâtre de l’Odéon

Si vous pouviez remonter le temps, avec quels artistes rêveriez vous de dîner ? C’est un peu le concept de la pièce Les Idoles montée au Théâtre de l’Odéon pour la première fois en janvier dernier. Cette création originale incluant des extraits de textes de Jean-Luc Lagarce, Hervé Guibert ou Bernard-Marie Koltès, rassemble les auteurs et cinéastes iconiques disparus, décédés du sida, de la jeunesse de Christophe Honoré. Le réalisateur de Plaire, aimer, et courir vite, qui ne voulait cependant “pas [d’un] mausolée”, évite le pathos avec beaucoup d’habileté et d’humour. Le spectateur passe du rire aux larmes très aisément, grâce à une mise en scène géniale et des acteurs phénoménaux. Je retiens sans hésiter de cette année 2019 cette pièce, subtile, intelligemment faite, montrant la diversité de cette “génération sida” fauchée dans la fleur de l’âge, leurs différences d’opinions relatives à l’homosexualité, au couple, à la maladie, à la création.

Pour celles et ceux qui n’auraient pas eu la chance d’aller la voir en 2019, sachez que le Théâtre de l’Odéon la remet sur les planches cette année.

• • • Plus d’infos : https://bit.ly/2SxStLE

Les Idoles, Théâtre de l’Odéon, 2019 © Jean Louis Fernandez

L’amour à la plage

Portrait de la Jeune Fille en feu, un film de Céline Sciamma

J’ai été émerveillée par cette histoire d’amour hors du male gaze, d’une poésie très simple, qui aborde au passage une multitude de thématiques telles que la sororité, l’avortement, l’accès des femmes aux oeuvres d’art mais également le travail de ces « peintresses » comme on pouvait les appeler à l’époque, dont l’histoire de l’art n’a conservé que quelques noms (Elisabeth Vigée – Le Brun ou Adélaïde Labille-Guiard). Pour moi, Céline Sciamma signe ici un film incroyable, doté d’une photographie digne d’un(e) peintre du XVIIIe siècle, avec des portraits, des marines et paysages magnifiques. Cette atmosphère valorise sans fioritures les personnages joués par Adèle Haenel, modèle rebelle, et Noémie Merlant, portraitiste indépendante.

• • • Plus d’infos : https://bit.ly/2F3h1nY

Extrait de Portrait de la Jeune Fille en Feu, Céline Sciamma, 2019

Au musée comme à la scène

L’exposition Degas à l’Opéra au Musée d’Orsay

Je me devais de choisir une des expositions du Musée d’Orsay, 2019 ayant été une année à grands crus, et j’ai choisi celle-ci. Certes, Degas n’est pas le sujet le plus original ou le plus révolutionnaire pour un musée parisien sur le XIXeme siècle (quoiqu’Orsay sache très bien faire dans l’original et le révolutionnaire, Le Modèle Noir le montre). Néanmoins, cette rétrospective est particulièrement bien maîtrisée et elle a permis d’admirer des oeuvres du monde entier, tout en proposant un parcours très didactique. Par ailleurs, sa muséographie fait preuve d’un décloisonnement intéressant, montrant des objets variés : éventails peints par l’artiste, maquettes de l’Opéra et de ses décors, croquis de costumes … Le point de vue scientifique n’en est pas pour autant lésé, Degas est présenté dans toute sa complexité : sa poésie, ses couleurs, sa modernité, ses innovations techniques, sa mondanité mais aussi son ambiguïté assez malsaine, le voyeurisme du spectateur vis à vis de ces jeunes danseuses. Un parti pris intéressant à une époque où les débats sur la séparation de l’homme et l’artiste sont inévitables.

Si vous ne l’avez pas encore visitée (ou souhaitiez y retourner), l’exposition est encore visible jusqu’au 19 janvier 2020.

• • • Plus d’infos : https://bit.ly/2slhkbb 

Edgar Degas, Musiciens à l’Opéra, 1872, huile sur toile, Städel, Frankfurt am Main, Allemagne


MATHILDE PRÉVOTAT

Que la lumière soit

Alex Majoli – Scenes, Le Bal

Il me tenait à coeur de mettre dans mon top culturel une exposition du Bal, espace d’exposition indépendant que j’ai découvert récemment et que j’apprécie pour sa programmation. Comme son nom l’indique, l’exposition Scène propose une ré-interprétation moderne du topos du theatrum mundi (ou théâtre du monde en vogue à l’époque baroque où chaque homme est un acteur qui joue son rôle et puis disparaît). Résultat de 8 années de captation de divers événements à travers le monde, elle présente des sujets divers (Jungle de calais, concerts, manifestations politiques, funérailles) qui sont tous liés par une même esthétique : les images semblent être faites de noir et de noir.  Les sujets sont en effet éclairés en clair-obscur par une lumière puissante et irréelle qui tombe sur les personnages plongés dans la pénombre. Les scènes représentées sont immédiatement dramatisées, théâtralisées et presque pictorialisées. L’ambiguïté se dégageant de ces images qui oscillent entre la réalité et la fiction est d’autant plus intéressante au vu du CV de l’artiste qui est photojournaliste et reporter de guerre. En somme, cette exposition promettant une réflexion sur la théâtralisation en photographie a tenu ses promesses et l’on ne pouvait qu’être impressionné devant la puissance des images photographiques que l’on avait devant les yeux. 

• • • Plus d’info : https://bit.ly/2slcoDa

Londres, Angleterre 2017, Scene #8667, Premier jour du Brexit au pub Jamaica Wine House, situé au cœur de la City. © Alex Majoli / Magnum Photos

La saga de l’été

La vente de Judith et Holopherne attribué à Caravage 

Vous en avez sûrement entendu parler, ce sujet a passionné tout le marché de l’art cet été. Je parle évidement de la vente du Caravage Judith et Holopherne découvert dans un grenier à Toulouse en 2014. Expertisé par le cabinet Turquin, le tableau a été exposé à Paris dans la galerie Kamel Mennour et à l’hôtel de vente Drouot où tous les professionnels du marché de l’art se ruaient afin de l’apercevoir. J’étais alors en stage chez un commissaire priseur et j’avais entendu plusieurs professionnels affirmer que certes ce tableau consistait un beau travail mais qu’il n’était surement pas de Caravage. Après l’avoir porté Trésor National, l’Etat français avait d’ailleurs renoncé à l’acheter, ce qui a entretenu les incertitudes. Selon quelques mauvaises langues ce doute sur la véracité de l’oeuvre est d’ailleurs à l’origine de la fin de cette affaire : destiné à être vendu aux enchères publique par la maison de vente Marc Labarbe, le tableau du maître du clair-obscur a finalement été vendu de gré à gré 48 h avant la vente. Les rumeurs disent que cette vente précipitée est dû à un nombre insuffisant d’ordres ce qui est fort probable au vu de la mise à prix de l’oeuvre qui devait être de 30 millions d’euros. L’acquéreur souhaite rester anonyme mais le New York Times a déjà annoncé qu’il s’agirait de James Tomilson Hill un collectionneur américain ! 

Le Caravage, Judith et Holopherne, vers 1607, huile sur toile, 144 x 173,5 cm © Cabinet Turquin


CAMILLE CHU

L’hommage photographique

L’exposition LOVE, Ren Hang à la Maison Européenne de la Photographie

Deux ans après sa disparition en 2017, la MEP a rendu hommage à Ren Hang à travers une première exposition majeure consacrée au photographe chinois. 150 images et 1200 images en diaporama retraçaient son travail photographique qui donnait à voir un certain visage de la jeunesse chinoise. Que ce soit des nus ou des paysages, des fleurs ou des animaux, des visages ou des corps, les photographies de Ren Hang sont directement reconnaissables de part leurs couleurs acidulées, la présence du rouge et leur mise en scène “osée” qui oscille entre érotisme et organique. L’exposition de la MEP nous dévoilait aussi un aspect un peu moins connu du travail de l’artiste : ses poèmes et écrits. « Si la vie est un abîme sans fond, lorsque je sauterai, la chute sans fin sera aussi une manière de voler » écrivait-il. Son oeuvre me fascine et me fascinera toujours ; la vision unique de l’artiste transcende un système politique stricte autant qu’elle exprime les conséquences de ce système sur une génération brimée. Souvent qualifiées de pornographiques, les photographies de Ren Hang ne sont pourtant que l’expression d’un désir de liberté de création. La MEP a réussi à mettre en lumière cette tension tout en rendant hommage à la poésie et à l’humour de l’oeuvre de Ren Hang. Une valorisation, à mon plus grand bonheur, de la photographie chinois contemporaine, comme la MEP l’avait déjà fait en 2017 avec Liu Bolin.

• • • Plus d’infos : https://bit.ly/2sxPRmm

Vue de l’exposition LOVE, Ren Hang, Maison Européenne de la Photographie, 2019

Quand électro rime avec classique

L’exposition Electro, De Kraftwerk à Daft Punk à la Philharmonie de Paris

Explorant l’imaginaire, les innovations et les utopies de la musique électronique, la Philharmonie de Paris nous a fait vibrer avec l’exposition Electro, De Kraftwerk à Daft Punk. De la naissance dans les années 1980 de la house et la techno jusqu’à la révolution électro au tournant des années 2000, l’exposition retraçait un phénomène musical mondial qui s’impose finalement comme une tendance artistique majeure de la culture contemporaine. De nombreuses installations rythmaient le parcours avec toujours plus d’effets visuels, de projections lumineuses, et bien sûr, d’expérimentations sonores. Conçues par Daft Punk, Kraftwerk ou encore Jean-Michel Jarre, les installations se déballaient devant nous au fur et à mesure de notre exploration dans l’espace. Plus qu’un simple parcours concentré sur l’évolution de l’électro, le visiteur pénétrait au sein d’un espace à l’image des lieux où se produisent et vivent les musiques électroniques, grâce à une scénographie originale proposée par le duo 1024 architecture. Ce qui m’a particulièrement marquée à travers cette exposition novatrice est la démonstration de la dimension politique et revendicatrice de l’électro. Véhiculant les notions de rassemblement dès ses débuts, l’avènement de l’électro a permis en même temps la cultivation d’une forme d’expression désincarnée et la création d’une contre-culture politique. C’est ainsi que sont apparus de “safer places” au sein de clubs pour des minorités notamment LGBTQ+.

Bonus : Si vous n’avez toujours pas de playlist pour animer votre nouvel an, nous vous proposons Detroit Mix, un extrait la bande-son de Laurent Garnier spécialement créée pour l’exposition ! 

De l’autre côté de la Manche

L’exposition Félix Vallotton à la Royal Academy of Arts de Londres

Sortons des sentiers battus de la France pour nous aventurer en Grande-Bretagne. J’ai eu la chance de visiter l’exposition Félix Vallotton, Painter of Disquiet, à la Royal Academy of Arts de Londres, organisée avec le Metropolitan Museum of Art de New York. Efficace, pertinente, intimiste, cette exposition rassemblait plus de 80 peintures et gravures de l’artiste suisse Félix Vallotton, surnommé le “peintre de l’inquiétude” (painter of disquiet). D’abord membre du groupe des Nabis, il se libérera ensuite de toute association pour se dévouer à la peinture de nus, de natures mortes, de paysages, dans un style tranchant et singulier. Point fort de cette exposition : Les intimités, une série de gravures sur bois publiée fin 1898 dans La Revue blanche, journal libéral de l’époque. Ces images frappantes laissent à voir des formes noires et blanches qui s’entremêlent pour subtilement dessiner des visages, des corps, des histoires.

• • • Plus d’infos : http://bit.ly/37khJJI

Félix Vallotton, La Paresse, 1896, xylogravure, 30,5 x 24 cm


JOSÉPHINE DE GOUVILLE

Le phénomène Hartung au Musée d’Art Moderne de Paris

Le 11 octobre dernier, après plusieurs mois de travaux, le Musée d’Art Moderne de Paris a rouvert ses portes pour écrire une nouvelle page de son histoire. Nouveau logo, simplification de son nom et conquête de nouveaux publics… Les ambitions sont grandes, à la hauteur de l’exposition consacrée à Hans Hartung ! Pas moins de 300 œuvres sont réunies pour rendre hommage et faire (re)découvrir la production de cet artiste majeur du XXe siècle.

J’ai été fascinée par cette exposition, et notamment par l’homme qui se cache derrière l’artiste. La prouesse du MAM dans cette rétrospective, c’est de nous faire rencontrer Hans Hartung dans son intériorité. Né en 1904 à Leipzig, il est le témoin extraordinaire d’un siècle bouleversé par les conflits. Et en même temps qu’il assiste et qu’il est impliqué dans cette sombre Histoire, il est à l’origine d’une production artistique prolifique… 15 000 œuvres à travers lesquelles il explore tous les supports et développe une panoplie d’outils.

Son œuvre est unique. Elle dégage à la fois un lyrisme et une émotion hors du commun, mais est aussi ancrée dans une forte rationalité. Ce passionné de mathématiques et d’astronomie est aussi mélomane et voue une grande admiration à Bach. La poésie est à son comble lorsque, dans la dernière salle, dépassés par le format immense des œuvres, les extraits de la musique de Jean-Sébastien Bach viennent nous bouleverser. A ce moment-là, nous sommes plongés dans la « magie Hartung », une sorte de beauté mystique qui nous dépasse.

Hans Hartung, T1986-E16, 1986 Acrylique sur toile 142 x 180 cm Fondation Hartung-Bergman, Antibes © ADAGP, Paris, 2019

« Parce que Léonard était avant tout un peintre »

L’exposition Léonard de Vinci au Musée du Louvre

Lors du vernissage de l’exposition Léonard de Vinci au Louvre, les deux commissaires, Vincent Delieuvin et Louis Frank, ont rappelé leur ambition première, celle de « comprendre Léonard ». Après 10 ans de travail, une analyse scientifique des tableaux et l’extraordinaire réunion de 162 œuvres, il est désormais possible d’affirmer que oui, « Léonard était avant tout un peintre ».

Bien qu’on ne lui attribue qu’une quinzaine d’œuvres, la peinture, qu’il aimait qualifier de « divine », était au cœur de chacune de ses réflexions : peindre, mais peindre juste. Dès lors, tout est plus lisible ! Chaque étude préparatoire, chaque retouche, chaque coup de crayon que l’on découvre grâce à l’incroyable prouesse de la réflectographie infrarouge, nous dévoile un Léonard de Vinci au travail. Loin du génie à l’intuition miraculeuse, on est face à un homme qui cherche et qui souhaite comprendre les lois qui gouvernent la nature.

Dans la pénombre, les quatre grandes sections thématiques nous guident sur le parcours initiatique de Vinci : sa période d’apprentissage dans l’atelier du sculpteur Verrocchio, son chemin vers la liberté pour représenter le mouvement et la dynamique des figures, son évasion dans les champs de la connaissance avec des dessins incroyables de minutie, et enfin l’accomplissement de toute sa vie avec les grandes œuvres peintes. Vous pourrez notamment découvrir la Sainte Anne et le Saint Jean-Baptiste après restauration ! 

L’ambition des commissaires est bien atteinte. Après ce pèlerinage sur les pas d’un géant, nous comprenons mieux qui est Léonard : « il était avant tout un peintre ».

Léonard de Vinci, Draperie Saint-Morys. Figure assise, vers 1475-1482. Détrempe grise, rehauts de blanc sur toile de lin. H. 19,6 ; L. 15,3 cm. Paris, musée du Louvre, département des Arts graphiques, INV. 2255 © RMN-Grand Palais (musée du Louvre) / Michel Urtado.

Léonard de Vinci, Étude de composition pour l’Adoration des Mages, vers 1480-1481. Pointe de plomb reprise à la plume et à l’encre brune. H. 28,4 ; L. 21,3 cm. Paris, musée du Louvre, département des Arts graphiques, RF 1978 © RMN-Grand Palais (musée du Louvre) / Michel Urtado.

BIENVENUE SUR ZAO !


22•12•19

Nous avons créé Zao Magazine, une revue en ligne participative portant sur l’art et la culture en général, des musées au marché, de la peinture ancienne au cinéma. Par ce média, nous voulons créer un espace de réflexion sur les enjeux contemporains de l’écosystème culturel mais aussi, et plus simplement, sur nos passions. 

Nous privilégions une approche décloisonnée des diverses thématiques abordées afin de conserver une curiosité et une ouverture sur le monde. La variété des parcours des auteurs participe à cette démarche et nous ancre dans un dialogue de non professionnels aguerris. Pour ce faire, nos propos s’organisent en trois axes : les “Regards”, les “Focus” et les “Rencontres”.

Nous inaugurons Zao avec un article Des difficultés de penser le musée contemporain, pour vous mettre dans le bain.

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